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Au village

Vive les vacances, plus de pénitences,
les cahiers au feu, les crayons en deux et la maîtresse au milieu !

Ce refrain était sur les lèvres de tous les enfants aussitôt que la sonnette annonçait la fin des classes.
Les grandes vacances étaient arrivées et nous étions bien décidés à en profiter au maximum.
Sur le chemin de la maison, nous discutions entre nous de nos futures occupations
pour les deux mois à venir…

Mon papa est né dans un petit village de Lorraine et toute sa famille y réside encore.
Lui était parti habiter la ville car il y avait rencontré une jeune fille
lors d'une permission du service militaire et il l'y avait épousé : maman.

On m’envoyait de temps en temps passer quelques jours dans la famille de mon père
et c'était à chaque fois un dépaysement complet pour moi.

Ma grand-mère paternelle, qui était veuve et toujours de noir vêtue,
habitait le premier étage d’une maison lui appartenant
tandis que sa fille occupait le rez-de-chaussée avec son mari et leurs deux garçons.
Une sorte d’étable jouxtait la maison et plusieurs vaches y occupaient une place de choix.
Pour entrer dans la maison, nous passions le plus souvent par l’étable
et je me rappelle encore avec quelle méfiance
je regardais ces énormes ruminants mâcher leur botte de foin.

Dans la cuisine de ma tante je me souviens aussi d’une certaine porte
que je ne quittais jamais des yeux
et dans ma tête de petite fille je m’inventais des histoires rocambolesques
à son sujet car je ne l’ai jamais vue ouverte.
J’ai su bien plus tard que derrière, on y faisait simplement fumer les viandes...
oh là là, quelle déception !!!
Dans la cuisine encore, une grande trappe dans le sol menait à la cave,
mais comme j’étais plutôt peureuse en ce temps-là, je ne m’y suis jamais aventurée.

A l’arrière de la maison se trouvait le grand jardin où poussaient d'énormes légumes.
Il y avait aussi des fruits à profusion sur les petits arbustes : groseilles blanches et rouges, cassis etc.
Ma grand-mère les cueillait quand elles étaient bien mûres
pour en faire de bonnes tartes que nous mangions toujours avec grand appétit.
Le bon air de la campagne y était certainement pour beaucoup,
mais nous avions toujours faim hi hi hi.

Non loin de là vivaient mon parrain (le frère de mon père), son épouse
et leurs deux enfants (un garçon et une fille).
La maison était construite de telle façon que le sous-sol se trouvait hors terre.
Pour entrer dans la maison on passait par un joli petit jardinet qui menait à la porte principale,
sinon on descendait de côté par le sous-sol où on entendait les grognements des cochons
qui résidaient dans une pièce spécialement aménagée.

De là s'ouvrait la porte qui menait dans le grand jardin et tout au fond,
je voyais souvent mon parrain s’affairer avec un masque et des gants.
Eh oui, en plus de son travail de mineur de fond, il était aussi apiculteur.
Le moment de l'année que je préférais ha ha ha, c’était quand il mettait les grilles dans la machine
et qu’en tournant la manivelle, le bon miel coulait dans le grand seau.
Miam, c'était un vrai délice !

Les jours passaient à toute allure car on était toujours très occupé.
Je me revois encore sur la grande charrette tirée par le tracteur au moment de la fenaison.
Mes cousins étaient là également et on se roulait avec bonheur dans le foin.
Un autre jour, c’était la cueillette des fruits sur les arbres et un autre,
la récolte des pommes de terre dans les champs.
On partait aussi chercher des betteraves pour nourrir les cochons
et il ne pas fallait pas oublier de ramener le pot de lait à faire remplir tous les jours.
  
Il n’y avait pas que le travail bien sûr, on prenait aussi le temps de s'amuser...
Avec les enfants du village on aimait jouer à la dînette près de la fontaine toute en longueur
à sauter à la corde, à la marelle,
et aussi à courir après le ballon dans les prés, près des enclos à chevaux.

Le dimanche matin, nous revêtions nos beaux habits et sur la table de la salle à manger
se trouvaient déjà les petits livrets pour enfants remplis de belles images saintes que nous emportions.
Le son aigrelet des cloches donnait le signal du départ pour l’église toute proche.
On voyait arriver de partout des familles entières et le bâtiment se remplissait rapidement.
Les messes d’alors étaient encore en latin et j’avoue
que je ne comprenais pas grand chose de ce qui se passait.
Les gens communiaient encore à genoux devant une sorte de grand portail bas
qui séparait le chœur des fidèles...
La célébration terminée, nous allions nous recueillir devant les tombes qui entouraient l’édifice
et tous les trois pas nous rencontrions des gens de connaissance
avec qui les discussions allaient grand train…

Je me considère comme un pur produit de la ville ha ha ha,
mais je garderai toujours un merveilleux souvenir de mes vacances à la campagne !

Chez Manon © 2003